
Par Christophe De Watrigant, Avocat à la Cour
AMF : sanction du dirigeant personne physique d'un émetteur
Publié dans « Semaine juridique n°48 » en mai 2007
Le dirigeant d’une société fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir prononcé à son encontre une sanction pécuniaire de 90 000 euros pour avoir manqué à l’obligation d’information du public en soutenant que les investigations des agents de la COB revêtaient un caractère coercitif et auraient dû en conséquence respecter Les règles de l’article 8, paragraphe 2 de la Convention EDH. Les pouvoirs conférés par l’article L. 621-10 du Code monétaire et financier aux enquêteurs de la COB, qui ne peuvent procéder à aucune perquisition ou saisie, ne comportant aucune possibilité de contrainte matérielle, ne constituent pas, au sens de l’article 8, paragraphe 2 de la Convention EDF, une ingérence de l’autorité publique dans l’exercice du droit au respect du domicile reconnu par le paragraphe 1° du même texte.
Le dirigeant fait encore le même grief à l’arrêt en soutenant que le terme émetteur au sens du règlement de la Commission des opérations de bourse désigne la personne morale émettrice, à l’exclusion de ses dirigeants personnes physiques. Mais il résulte de la combinaison des articles L. 621-14 et L. 621-15 du Code monétaire et financier et de l’article 1° du règlement n° 98-07 de la COB, alors applicable, qu’une sanction pécuniaire peut être prononcée à l’encontre de toute personne, physique ou morale, ayant manqué aux obligations d’information du public définies par ce règlement. Dès lors, c’est à bon droit que la cour d’appel a retenu que le dirigeant pouvait être sanctionné au titre des manquements, commis par lui en tant que dirigeant de la société émettrice, à l’obligation d’information imposée à celle-ci par l’article 4 de ce texte.
Cass. com., 30 mai 2007, n° 06-11.314, FS P+B, Robinson c/ AMF et Sté Métaleurop :-Juris-Data n° 2007-039053
LA COUR
Attendu, selon l’arrêt attaqué (CA Paris, 13 décembre 2005), que le 18 février 2003, le directeur général de la Commission des opérations de bourse (la COB) a décidé l’ouverture d’une enquête sur l’information financière et le marché des actions de la société Métaleurop à compter du 31 décembre 2001 ; que conformément à la décision prise le 1° juin 2004 par le collège de l’Autorité des marchés financiers (l’AMF) au vu du rapport établi par la direction des enquêtes et de la surveillance des marchés, le président de l’AMF a, le 21 juillet 2004, adressé des notifications de griefs à la société Métaleurop et à son dirigeant, M. Robinson, sur le fondement des articles 1° à 4 du règlement n° 98-07 de la COB : que, par décision du 14 avril 2005, la Commission des sanctions de l’AMF a retenu que M. Robinson et la société Métaleurop avaient manqué à leur obligation d’information du public et a prononcé à leur encontre des sanctions pécuniaires ;
Sur le premier moyen :
« Attendu que M. Robinson fait grief à l’arrêt d’avoir prononcé à son encontre une sanction pécuniaire de 90 000.euros, alors, selon le moyen :
1°/ que la contrainte peut être matérielle ou juridique ; qu’au regard de la réglementation en vigueur à l’époque des faits reprochés, toute personne s’opposant aux investigations des agents de la COB sur le fondement de l’article L. 621-10 du code monétaire et financier s’exposait nécessairement aux sanctions pénales du délit d’entrave prévues par l’article L. 642-3 du même code qu’en décidant néanmoins que ces investigations dont l’obstruction était pénalement condamnée ne revêtaient pas de caractère coercitif, la cour d’appel a violé ces dispositions dans leur rédaction applicable à la cause, ensemble l’article 8 & 2 de la Convention européenne des droits de l’homme ;
2°/ que la cour d’appel ne pouvait retenir que les investigations accomplies par les agents de la COB au siège social de la société Métaleurop étaient « prévues ” par la loi» au sens de l’article 8 & 2 de cette Convention dans la mesure où l’article L. 621-190 du code monétaire et financier ne renseigne nullement sur leurs modalités de leur réalisation et plus particulièrement ne précise ni les modalités d’accès aux locaux professionnels ni les modalités de communication des documents réclamés ;
3°/ que l’ingérence résultant de l’article L. 621-10 du code monétaire et financier ne peut être « proportionnée aux buts légitimes recherchés » au sens de l’article 8 $ 2 de la Convention européenne, faute pour cette disposition légale d’imposer ou de prévoir un contrôle préalable du juge judiciaire et la présence d’un officier de police judiciaire pendant le déroulement des opérations ou, à tout le moins, de délimiter les pouvoirs d’appréciation de la COB quant à l’opportunité, le nombre et la durée de ces investigations ; qu’à défaut d’avoir refusé de faire application de ces dispositions internes au bénéfice de leur absence de conformité avec les exigences fondamentales du droit conventionnel européen, la cour d’appel a méconnu ces textes, ensemble l’article 55 de la Constitution ;
Mais attendu que les pouvoirs conférés par l’article L. 621-10 du code monétaire et financier aux enquêteurs de la COB, qui ne peuvent procéder à aucune perquisition ou saisie, ne comportant aucune possibilité de contrainte matérielle, ne constituent pas, au sens de l’article 8 & 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, une ingérence de l’autorité publique dans l’exercice du droit au respect du domicile reconnu par le & 1° » du même texte ; que le moyen, non fondé en ce qu’il soutient le contraire, est pour le surplus inopérant ;
Et sur le second moyen :
« Attendu que M. Robinson fait encore le même grief à l’arrêt, alors, selon le moyen, que le terme « émetteur » au sens du règlement COB n° 98-07 désigne la personne morale émettrice, à l’exclusion de ses dirigeants personnes physiques : qu’en jugeant néanmoins, au cas d’espèce, que les obligations imposées à « l’émetteur » (la société Métaleurop} incombaient également à son dirigeant personne physique, M. Robinson, la cour d’appel a manifestement violé les articles 1° et 4 de ce règlement ;
« Mais attendu qu’il résulte de là combinaison des articles L. 621-14 et L. 621-15 du code monétaire et financier et de l’article 1° du règlement n° 98- Q7 de ta COB, alors applicable, qu’une sanction pécuniaire peut être prononcée à l’encontre de toute personne, physique ou morale, ayant manqué aux obligations d’information du public définies par ce règlement ; que dès lors, c’est à bon droit que la cour d’appel a retenu que M. Robinson pouvait être sanctionné au titre des manquements, commis par lui en tant que dirigeant de la société émettrice, à l’obligation d’information imposée à celle-ci par l’article 4 de ce texte ; que le moyen n’est pas fondé ;
Par ces motifs : -Rejette le pourvol (…).
MM. Tricot, prés., Petit, rapp., Main, av. gén. ; M° Spinosi, M° Blanc, av.
NOTE
Le 18 février 2003, le directeur général de la Commission des opérations de bourse (COB) décidait l’ouverture d’une enquête à propos notamment de l’information financière de la société Métaleurop à compter du 31 décembre 2001. Après enquête, le président de PAMF adressait le 21 juillet 2004 une notification des griefs aux termes de laquelle il était reproché à la société Métaleurop et à son mandataire social d’avoir enfreint les dispositions des articles 1 à 4 du règlement ” COB n° 98-07.
La société émettrice et son dirigeant n’ayant pas porté à la connaissance du public l’augmentation des crédits à court terme à ”la suite de R signature d’un protocole d’accord entre la société, ses banques créancières et une société de négoce suisse, la Commission des sanctions de PAME, par décision du 14 avril 2005, retenait contre M. X et la société Métaleurop, dont il était l’un des dirigeants, un manquement à l’obligation d’information du public, et prononçait, également à l’encontre du dirigeant personne physique, une sanction pécuniaire, Par arrêt du 13 décembre 2005, la cour d’appel de Paris confirmait, et maintenait la sanction pécuniaire à l’encontre du dirigeant à hauteur de 90 000 €. Le dirigeant invoquait deux moyens pour critiquer l’arrêt d’appel. Au soutien du second moyen, sur la question de la responsabilité des dirigeants sociaux, M. X faisait valoir que le terme « émetteur » au sens du règlement COB n° 98-67 désigne la personne morale émettrice, à l’exclusion de ses dirigeants personnes physiques, Le débiteur de l’obligation d’information du public est, et doit rester, dans l’esprit de l’auteur du recours, la société émettrice personne morale, Partant, le dirigeant personne physique ne peut en aucun cas se voir reprocher la violation des articles 1 à 4 du règlement n° 98-07.
La Cour de cassation confirme pourtant l’arrêt d’appel, en précisant qu’il résulte de la combinaison des articles L. 621-14etE. 621-15 du Code monétaire et financier, mais aussi de l’article 1° du règlement COB n° 98-07 (devenu AME règl. gén. art. 221-1),que les sanctions pécuniaires applicables en cas de manquement d’une société à ses obligations d’information sont applicables aussi au dirigeant de celle-ci.
La solution est sans surprise. La Cour de cassation dispose sur la question d’une jurisprudence bien établie, et s’appuie sur les opinions fermes de l’AME et avant elle de la COR, visant à la responsabilisation des dirigeants personnes physiques en cas de manquement aux règlements. En cette matière, tout a commencé il y a une douzaine d’années. C’est en effet par un arrêt du 14 novembre 1995 (Cuss. com.,
14 nov. 1995 : RIDA 1995, n° 1380) que la chambre commerciale de la Cour de cassation à confirmé pour la première fois une sanction personnelle prononcée par la COB contre le président-directeur général d’une société cotée. Il lui était reproché d’avoir publié plusieurs communiqués faisant état de projets successifs de rachat des titres de le société et d’une restructuration du capital, et d’avoir provoqué la suspension de la cotation des titres sur Le fondement d’informations inexactes, maintenant ainsi artificiellement les cours de bourse à des niveaux élevés, en dépit de la détérioration de la situation de la société, Plus récemment, la chambre commerciale avait approfondi sa position dans l’affaire Kalisto (Cass. com., 31 mars 2004 : RJDA 2004, n° 1132).
Loin d’être seulement traditionnelle, cette opinion de le Cour de cassation est d’abord logique. Chaque fois qu’elle en a l’occasion, la cour suprême ne manque pas de rappeler en effet que le pouvoir réglementaire conféré à l’AMF permet à cette autorité de prendre des règlements concernant le fonctionnement des marchés placés sous son contrôle, sans nécessairement préciser à qui ces règlements s’imposent. Parmi ces règlements, figurent en bonne place celui relatif à obligation d’information du public (Règl. COB n° 98-07).
En vertu de ce pouvoir réglementaire, les dispositions prises par V’AME, pour contrôler le correct fonctionnement des marchés, peuvent fort bien concerner des personnes autres que les seules sociétés faisant publiquement appel à l’épargne. Le pouvoir de sanction quant à lui, corollaire du pouvoir réglementaire pour l’AME peut toucher tous les auteurs de pratiques contraires aux règlements lorsque ces pratiques ont pour effet, notamment, de fausser le fonctionnement normal du marché. Ne nous y trompons pas ! Il est ici question de l’imputabilité des manquements : il n’est nullement question de responsabilité civile du dirigeant. L’AMF n’est ni une victime d’un préjudice du fait d’une faute commise par une personne morale, ni le mandataire de porteurs de titres de sociétés cotées. Contrairement à ce que l’on observe en responsabilité civile, l’AME, en exerçant son pouvoir de sanction, n’a pas à rechercher le lien de causalité entre une faute personnellement commise par le dirigeant mis en cause et le préjudice subi par des tiers. Le prononcé d’une sanction pécuniaire par PAME pour violation d’un règlement, à l’égard du dirigeant d’une personne morale n’est pas non plus subordonné à la démonstration d’une faute séparable de ses fonctions. La procédure mise en place par l’AME aboutit à une sanction de nature administrative, prononcée par une autorité administrative indépendante, ayant pour mission de veiller au fonctionnement des marchés placés sous son contrôle. Dès lors, le manquement administratif peut tout aussi bien concerner une personne physique qu’une personne morale (V. sur cette question les conclusions de M. l’avocat général Lafortune : Gaz.Pal. 2004, I, jurispr. p. 1892).
Tout l’intérêt de cet arrêt du 30 mai 2007 réside dans sa motivation. Contrairement aux précédentes décisions touchant un dirigeant, la Cour de cassation confirme ici la sanction pécuniaire de l’intéressé personne physique sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 621-14etL. 621-15 du Code monétaire et financier, et ne se réfère à l’article 1°° du règlement COB n° 98-07 qu’en ce que celui-ci dispose que le terme « personne » vise tout aussi bien une personne physique qu’une personne morale, et non pas parce qu’il dispose que la sanction pour violation du manquement est aussi applicable aux dirigeants. L’article L. 621-15 du Code monétaire et financier prévoit notamment la possibilité pour la Commission des sanctions de sanctionner « toute personne » qui se livre à la diffusion d’une fausse information, Quant à l’article L. 621-14-du Code monétaire et financier, il prévoit notamment que le collège de l’AMF peut en joindre à « la personne concernée », auteur d’un tel manquement, d’y mettre fin. En autre, l’article °° du règlement COB n° 98-07 énonce qu’une sanction pécuniaire peut être prononcée à l’encontre de toute personne, physique ou morale, ayant manqué aux obligations d’information du public.
Cette motivation, combinant les articles L. 621-14 et L. 621-15 du Code monétaire et financier, n’est pas sans rappeler la formulation de l’arrêt rendu également par la chambre commerciale le 33 juillet 2006, au terme duquel un commissaire aux comptes, associé d’une société titulaire du mandat de commissaire aux comptes, fut personnellement sanctionné. Déjà à l’époque, la Cour considérait qu’il résulte « de la combinaison des articles L. 621-14 et 621-15 du Code monétaire et financier et de l’article 1°du règlement n° 98-07 de la COB alors applicable qu’une sanction pécuniaire peut être prononcée à l’encontre de toute personne physique ou morale ayant manqué aux obligations d’information du public définies par ce règlement » (Cass. com., 11 juill. 2006 : Banque et Droit, n° 109, sept-oct 2006, obs. H. de Vauplane, ].-]. Daïgre, et B. de Saint-Marc). Mais cette décision ne concernait à l’époque que le commissaire aux comptes, et nullement le dirigeant personne physique,
L’autre intérêt de la motivation, c’est le renvoi à P article 1° du règlement COB n° 98-07, aujourd’hui abrogé en tant que tel, mais dont les dispositions ont été intégrées au règlement général de l’AMF. Ces derniers temps, le texte des articles 221-1 et 222-1 du règlement général de l’AME tirés pour l’essentiel de l’article 1° du règlement COB n° 98-07, a connu en effet des fortunes diverses. Avant F arrêté du 4 janvier 2007 (A. 4 janv. 2007 : JO 20 janv. 2007), modifiant une fois encore le texte du règlement général de lAME P article 222-1 déclarait applicables les dispositions relatives aux obligations d’information également « aux dirigeants de l’émetteur, de l’entité ou de la personne morale considérée ». Puis, sans véritable raison, ces mêmes mentions avaient été retirées à l’occasion des modifications du règlement général introduites par l’arrêté du 7 janvier 2007. Elles ont finalement été réintroduites par arrêté du 26 février 2007 (A. 26 févr.2007 :J0 2 mars 2007) modifiant en son dernier alinéa P article 221-1 nouveau du règlement général de l’AMF. Ii semble que cette disparition aussi subite qu’inexpliquée ne soit en définitive que le fait d’une erreur matérielle. En tous les cas, désormais, les dispositions de l’actuel article 221-1 du règlement général de l’AMF ne souffrent plus la discussion: elles rendent les dirigeants de la société émettrice responsables de P information permanente et périodique communiquée par la société. ‘
La formulation du dispositif d’arrêt peut paraître assez générale.
Elle laisse ainsi supposer que la Cour de cassation approuve une application quasi-automatique de la sanction à la personne physique, validant implicitement le raisonnement selon lequel une personne morale ne peut agir que par l’intermédiaire de personnes physiques. Si l’on s’en tient à cette analyse, la responsabilité des dirigeants de la personne morale équivaudrait à une responsabilité de plein droit. Certes, l’obligation d’informer correctement le marché pèse sur la société émettrice ; néanmoins, celle-ci ne peut agir, et ne peut satisfaire à cette obligation d’information, que par l’intermédiaire de son dirigeant. Tout aussi automatique peut paraître le cumul des responsabilités. Le dirigeant peut donc être sanctionné en même temps que la personne morale, et en plus de la sanction infligée à la personne morale, tout comme en matière pénale où la responsabilité de la personne morale n’est pas exclusive de la responsabilité de la personne physique, organe ou représentant de la société. Ce principe a clairement été rappelé par un chapeau de principe dépourvu d’ambiguïté, l’an dernier à l’occasion de la sanction précitée (Cuss. com., 11 juill. 2006, préc.) infligée à un commissaire aux comptes personne physique « une sanction pécuniaire peut être prononcée à l’encontre de toute personne physique ayant porté atteinte à la bonne information du public par la communication d’une information inexacte, imprécise ou trompeuse ; il importe peu à cet égard que puisse également être sanctionnée à ce titre la personne morale au nom et pour le compte de laquelle cette personne physique a agi ».
La généralité apparente du dispositif de l’arrêt est en réalité trompeuse. Il ne peut y avoir automatiquement sanction du dirigeant personne physique, dès lors qu’un manquement à l’obligation d’informer loyalement le marché est reproché à la société personne morale qu’il est sensé représenter. Sur ce point, iles intéressant d’examiner la décision Métaleurop du 30 mai 2007 de la Cour à la lumière des plus récentes décisions de sanction prononcées par l’AMF sur le même thème du manquement à l’obligation d’information du public. Il s’agit notamment des décisions de la Commission des sanctions de PAME : Boutin du 15 février 2007, Altran technologies du 29 mars 2007, Tissier du 10 mai 2007, ou encore Rhodia et Tirouflet du 24 mai 2007, Quelques-unes de ces décisions ont été certes rendues parfois au visa du très controversé article 632-1 du règlement général de l’AMF Néanmoins, dans tous les cas, la Commission des sanctions s’est attachée à examiner la situation précise du dirigeant à l’époque de la consommation du manquement, et son rôle précis dans la diffusion de l’information au marché. Point trop d’automaticité, mais plutôt une volonté vraie de contrôler au cas par cas si l’imputation du manquement est justifiée, à l’espèce donnée, pour ce qui concerne le dirigeant personne physique.
D’après la Commission des sanctions, il apparaît que seuls peuvent être poursuivis dans une société anonyme le président-directeur général ainsi que des directeurs généraux délégués. Dans l’affaire Métaleurop du 30 mai 2007, le dirigeant condamné occupait les fonctions de président du directoire, puis président du conseil d’administration.
À l’inverse, un directeur adjoint salarié, même s’il était en charge des finances à l’époque des faits critiqués, ne peut exposer sa responsabilité dès lors qu’il n’avait aucune compétence décisionnelle en matière de communication d’informations financières, et qu’au surplus ä n’avait pas pris personnellement part à la communication des informations inexactes reprochées à la personne morale (décision Altran). Dans le même ordre d’idées, un membre du conseil d’administration, pourtant président du comité des comptes, ne peut être personnellement sanctionné au titre du manquement à l’obligation d’information dès lors qu’il est démontré l’absence de participation matérielle de P intéressé à la communication fautive (décision Rhodia). L’examen du niveau de responsabilité individuelle des membres d’un organe collégial est nettement plus délicat. La Commission des sanctions n’a pas hésité à sanctionner les membres du directoire d’une société, dès lors que cet organe n’était composé que de deux personnes et qu’il était, au cas d’espèce, impossible d’imputer le manquement à l’obligation d’information à tel ou tel des deux dirigeants (décision Boutin).
Les manquements dont le dirigeant est personnellement à l’origine entraînent certainement le prononcé d’une sanction à son en contre. En revanche, ils n’entraînent pas systématiquement sanction de la personne morale. Dans ce sens là aussi, le cumul des sanctions n’a donc finalement rien d’automatique. C’est ce qu’a par exemple décidé la Commission des sanctions le 6 avril 2006 (Commission des sanctions, 6 avr. 2006, aff. Sté Cofidur et M. Durat). Si, et c’était le cas dans cette affaire, les renseignements ont été formellement présentés par la société, celle-ci doit être dispensée de toute sanction quand il est avéré qu’elle a été trompée par son dirigeant, et qu’elle se trouve par là même victime des agissements de celui-ci. Au cas d’espèce le dirigeant avait usé de manœuvres tendant à empêcher les services de gestion et les contrôleurs de gestion de la société de découvrir ses agissements. Pourtant, la Commission des sanctions n’a pas pu écarter totalement la responsabilité administrative de la société émettrice. Elle rappelle en effet que le débiteur de l’information reste d’abord la société émettrice, quoi qu’il advienne. Au cas particulier, les renseignements fallacieux fournis au marché avaient été formellement présentés et diffusés par la société émettrice. Néanmoins, il était indéniable que la société était plus victime que bénéficiaire du comportement de son dirigeant. Aussi, pour tenir compte de cette situation très particulière, et surtout très ambiguë, la Commission des sanctions, sans écarter la responsabilité administrative de la société émettrice, a décidé d’appliquer pour ce qui la concerne la technique de la dispense de peine, comme il est parfois observé en matière pénale.
Christophe de WATRIGANT, avocat à la Cour, Cabinet Laborde
Mots-Clés : Marchés financiers – Commission des opérations de bourse – Pouvoir d’investigation des enquêteurs de la COB : caractère coercitif (non) – Application de Conv. EDH, art. 8, $ 2 (non) Marchés financiers – Autorité des marchés financiers – Manquement à l’obligation d’information du public en cas d’appel public à l’épargne – Sanction pécuniaire prononcée contre le dirigeant de la société émettrice.
Textes : C. mon ét, fin, art. L. 621-10
JurisClasseur : Banque-Crédit-Bourse, Fasc. 1512 et 1600
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